5371 - Traduction de l’Animé et l’Inanimé de William James Sidis
N. Lygeros
Parmi les lois physiques, il existe une caractéristique générale à savoir la réversibilité du temps ; c’est-à-dire, l’univers entier devrait conserver la trace des différentes positions par lesquelles sont passées les corps durant un intervalle de temps donné, mais dans l’ordre inverse par rapport aux positions qui apparaissent actuellement, alors l’univers dans ce cas imaginaire, devrait encore obéir aux mêmes lois.
Pour tester la réversibilité, nous pouvons imaginer ce que nous pouvons appeler « l’univers inverse », ce qui veut dire, un autre univers imaginaire dans lequel les positions de tous les corps à différents moments du temps, sont les mêmes comme dans notre univers réel, dans lequel les positions apparaissent dans les mêmes intervalles de temps respectifs mais dans le sens inverse. Pour nous aider à imaginer cet univers inverse nous pouvons rappeler à nous-mêmes que, lorsque nous regardons dans un miroir, le monde imaginaire que nous voyons dans ce miroir correspond en chaque détail au monde que nous voyons à l’exception du fait qu’une dimension de l’espace apparait dans un ordre inverse, plus précisément la direction perpendiculaire au plan du miroir. Si, maintenant, nous concevons le temps comme une sorte de dimension additionnelle de l’univers, alors notre « univers inverse » serait un univers dans lequel il y aurait une inversion similaire dans cette dimension, en laissant les trois dimensions de l’espace inanimées. Ou pour le dire d’une autre manière, la série d’images produites par un film rétrograde donnerait exactement l’impression d’un tel univers inverse.
Avec cet univers, notre test de la réversibilité de toute loi physique donnée ou d’un processus serait, quand la loi se présente bien, quand le processus subsiste encore dans cet univers inverse. Dans le but de voir que dans tous les cas, nous pouvons trouver en premier comment traduire toute apparition physique dans l’apparition correspondante de notre univers inverse. Pour commencer, toutes les positions dans l’espace demeure absolument les mêmes dans l’univers inverse comme dans l’univers réel ; les intervalles de temps, par contre, conservent la même taille mais sont inversés en direction. En d’autres termes, bien que la mesure absolue d’un intervalle de temps demeure inchangée, il est nécessaire dans la traduction des termes de l’univers inverse, de remplacer « avant » par « après », et vice-versa.
Nous en arrivons à un problème de plus grande difficulté en considérant ce que devient l’accélération. L’accélération est le taux de changement de la vitesse. Si pour rendre cette question plus simple, nous supposons que l’accélération est uniforme, alors, l’accélération d’un corps est égale à la différence de la vitesse divisée par l’intervalle de temps nécessaire pour produire cette différence. Si, par exemple, dans un intervalle de temps T la vitesse est changée en la vitesse B, l’accélération (représentée vectoriellement) sera (B-A)/T. Dans le mouvement correspondant dans l’univers inverse dans l’intervalle de temps T la vitesse change de –B à –A, aussi l’accélération est [(-A) – (-B)]/T, ou (B-A)/T. En d’autres termes, l’accélération d’un corps inverse aussi demeure inchangée dans l’univers bien en valeur qu’en direction, dans la traduction en termes d’univers inverse. Le raisonnement ci-dessus suppose que l’accélération du corps est uniforme, mais une extension du même raisonnement montrera que la même conclusion est valable même si l’accélération varie constamment.
Il en est de même pour la cinématique pure. Pour des termes dynamiques, il est nécessaire de trouver ce qui arrive à la masse des corps dans l’univers inverse. Maintenant, comme la masse est essentiellement une quantité de matière, sans relation avec le temps, il s’ensuit que la masse n’est pas le moins changé par l’inversion. De cela il découle, d’après ce que nous avons vu, que tous les moments sont inverses en direction mais pas en valeur, tandis que, dans l’univers inverse, la force agissant sur le corps, en étant le produit de deux grandeurs qui demeurent inchangées dans l’univers inverse (plus précisément, la masse d’un corps et d’une accélération, en supposant qu’aucune autre force n’agit) doit nécessairement rester inchangée dans l’univers inverse, non seulement en valeur mais aussi en direction. Il aurait pu être attendu, que dans l’univers inverse, les forces auraient changé de direction ; mais ce n’est pas le cas.
L’énergie, qui est entièrement dépendante d’entités telles que la position et la force (dans le cas de l’énergie potentielle) ou de la masse et du carré de la vitesse (dans le cas de l’énergie cinétique) de tout ce qui demeure entièrement inchangé dans l’univers inverse, doit manifestement demeurée entièrement inchangée.
Nous arrivons pourtant à un problème plus compliqué sur la question de la relation causale. Dans ce but, il est nécessaire de distinguer différentes sortes de causalité. La vraie relation de cause à effet est une séquence temporelle, i.e. la disparition du support d’un objet est la cause de sa chute. La force de la gravité a été présente tout le temps ; et c’est une conséquence logique de l’existence d’une telle force que la chute d’un objet doit succéder à la disparition de son support. Strictement pourtant, la force de gravité n’est pas dans ce cas une cause, mais une explication, une raison de l’actuelle cause, qui est elle-même essentiellement une séquence avec une explication. Aussi nous avons à distinguer la relation de raison et de conséquence d’une part, et d’autre part, la relation de cause à effet. La dernière implique une séquence dans le temps, la première est une pure relation de déduction logique et physique essentiellement la simultanéité, pour la raison et la conséquence, l’une étant une déduction logique de l’autre, les deux doivent subsister ensemble.
Maintenant, dans l’univers inverse nous devons supposer que toutes les relations logiques des faits demeurent les mêmes. Cela n’implique rien en ce qui concerne les phénomènes mentaux ; au sujet desquels nous traiterons plus tard dans notre investigation. En fait, les relations logiques des faits doivent par nécessité demeurer en dehors de la question de savoir si la pensée existe ou pas dans l’univers. Les relations logiques peuvent être dites pour être simple, les faits les plus extérieurs de l’existence. Si A est B et B est C, la loi est alors, non que pense que A est C, c’est un fait vérifiable par l’observation que A est C. Ainsi même si l’univers inverse devait détruire complètement tous les phénomènes mentaux, les relations logiques demeureraient inchangées, et par conséquent, aussi la relation de raison et de conséquence.
Mais pour la vraie causalité physique, il en va autrement. Si certaines lois générales ou une force particulière résultante de sa conséquence, dans l’univers réel, qu’un évènement A doit être suivi par un évènement B, alors la loi correspondante ou, la force dans l’univers inverse doit résulter des évènements correspondants A’ et B’ qui se succèdent dans un ordre inverse. Ce qui veut dire que, si un évènement physique en cause un autre dans l’univers réel, alors l’évènement correspondant dans l’univers inverse à l’effet devra, en général, causer l’évènement correspondant dans l’univers inverse à une cause. Ce qui veut dire que dans la traduction en termes d’univers inverse « cause » doit être traduit par « effet » et vice-versa. Ceci, pourtant n’est pas une loi adéquate, il existe des exceptions, une relation causale étant quelquefois sévèrement atténué ou rendu méconnaissable par l’inversion du temps.
À nouveau dans l’univers inverse, des propriétés comme la densité, la chaleur spécifique, l’électricité, la quantité de chaleur, la température, etc., demeurent inchangées. Il serait possible de montrer que des propriétés telles que l’électricité et le magnétisme, demeurent inchangées mais que la direction du courant électrique serait inversée. Aussi tous ces phénomènes physiques pourraient être traduits en termes d’univers inverse. Les différentes variétés de substance, dépendant de la structure interne de l’atome et de la molécule, etc., demeurent aussi inchangées dans l’univers inverse.