6795 - Le modèle mental de Leonardo da Vinci
N. Lygeros
« Supposé un corps suspendu là, semblable à celui d’un oiseau et la queue tordue sous un angle variable à divers degrés ; tu pourras ainsi déduire une règle générale, au sujet des différentes torsions et circonvolutions des oiseaux provenant de la flexion de leur queue. Dans toutes les variétés du mouvement, la partie la plus lourde du corps le guidera. »
Le modèle mental de Leonardo da Vinci semble élémentaire au premier abord surtout lorsque nous l’examinons cinq siècles après sa création. Il est nécessaire de se replacer dans le contexte et de réaliser que sa machine volante n’était pas seulement une utopie mais un objet impensable à cette époque. Aussi le modèle mental envisagé est celui de l’impensable. Cette idée a le mérite de remettre les choses à leur place. De plus sa remarque sur les mouvements peut être rendue concrète avec un athlète qui effectue les mouvements aux anneaux, pour ne pas employer directement un simulateur de vol. En effet, au départ, l’athlète a des difficultés à se maintenir dans l’espace, car le degré de liberté des anneaux est très important et doit nécessairement être contrôlé. Car les deux points d’attache ne suffisent pas pour engendrer un équilibre stable ou plutôt une convergence rapide dans le mouvement du corps. Leonardo da Vinci avant même le vol proprement dit, se rend compte de la difficulté de maîtriser son vol dans les airs car il n’existe pas de point fixe. Tous les mouvements sont relatifs, et il est naturellement amené à considérer le centre de gravité, bien avant la concrétisation physique de Galileo Galilei. Il met en évidence le fait qu’il faut donner de l’importance à la partie la plus lourde du corps. Dans ce sens, il parvient à unifier la vision du mécaniste avec celle de l’observateur du vol des oiseaux. Son modèle mental est remarquable dans le sens où il s’applique aussi à la chauve-souris. Mais dans tous les cas son propos profond est celui de la codification la plus générale qui soit de la connaissance des mouvements dans les airs. Il s’agit pour lui d’effectuer un véritable apprentissage formel. Car la marche dans les airs n’a rien de naturel et la moindre erreur a un coût extrêmement grand. Il a une approche anthropométrique mais aussi ergonomique du problème, car tout est calcul puisque c’est le seul moyen de garantir l’élévation du corps et ensuite son vol dans les trois dimensions de l’espace.