1307 - La tour hellénistique
N. Lygeros
Les vestiges de pierre formaient encore le cercle de la tour. Cette enceinte gardait en elle des morceaux du passé. Elle se défendait encore, malgré le temps passé. Les hommes l’avaient abandonnée et elle n’attendait plus rien d’eux. Elle appartenait désormais au temps du passé.
Comme si quelqu’un l’avait figée pour qu’elle garde la mémoire de cette époque, de ce temps où elle était encore une tour imprenable, de ses instants où elle n’avait pas encore connu l’abandon des siens. Elle avait gardé ses rondeurs d’antan, celles qui étaient sensées la protéger de ses ennemis. Seulement, elles ne pouvaient rien contre ceux de l’intérieur. Ses ancêtres lui avaient parlé du cheval de Troie mais elle ne les avait pas écouté. Elle ne savait pas encore que les Tours sont enclavées dans les angles de l’échiquier de la guerre. Elle ne savait pas que les Tours ne pouvaient briller que par leur sacrifice dans la bataille. Aussi quand vint le temps de la bataille, elle s’effondra. Ses pierres rejoignirent leur terre natale, ce morceau de temps. Et des siècles durant elle put contempler la lâcheté des envahisseurs. Elle vit leurs mépris. Ils croyaient l’avoir brisé de leurs fers. Mais les pierres criaient encore à l’injustice bien après les morts. Elles continuaient à vivre libre sur la terre qui l’avait vu naître et qui la verrait mourir. Les envahisseurs avaient tout saccagé sur leur passage et il restait qu’elle pour témoigner. De combattante, elle était devenue victime et de victime, combattante à nouveau. Car elle ne pouvait oublier les massacres commis, car elle ne pouvait oublier les siens, car elle ne pouvait oublier leur tombe puisqu’ils étaient en elle. C’était pour cette raison qu’elle était devenue le symbole de la résistance des victimes.