938 - La question orientale
N. Lygeros
Il est à présent indiscutable que la simple mention de la question orientale au sein de l’Union Européenne et même de ses états membres est susceptible d’ envenimer des relations qui se prétendaient saines au moins sur le plan diplomatique. Ceci prouve que la question orientale n’est pas une simple adhésion de plus comme certains tentent de le faire croire à la population. Elle représente un véritable changement de phase pour l’Union Européenne. Il ne s’agit pas d’un simple déplacement de frontières. S’il y a déplacement, il est massif car il est d’ordre barycentrique. La frontière orientale de l’Europe est celle qui a le plus changé ces derniers temps en particulier avec la dernière adhésion. Celle-ci a eu pour conséquence l’absorption d’anciens états de l’est en se gardant bien d’être étendue à la Russie non pour un problème religieux ou européen mais justement en raison de la masse, des frontières et de l’instabilité de celle-ci. La modification aurait été beaucoup trop importante pour les données européennes. La question orientale aborde la même problématique mais avec plus de vigueur, car il y a l’entrée en jeu du problème religieux qui est toujours difficile à gérer comme le prouve le comportement de l’Union Européenne dans le conflit yougoslave. Étant donné qu’elle touche une religion qui a de nombreuses extensions en termes de géostratégie, les mouvements du corps diplomatique sont encore plus réservés qu’à l’habitude. Pourtant les données européennes sont là et avec elles les dates butoirs d’Octobre pour le rapport de la Commission, et de Décembre pour les chefs d’Etats de l’Union Européenne. Après, quoi que l’on dise, ces événements seront décisifs pour le futur et pour la vision que nous avons de l’Union Européenne. Aussi la mention à l’utilisation d’un référendum pour régler la question orientale ou même son extension afin d’être généralisé à toute nouvelle adhésion est tout simplement hors contexte géopolitique. Il s’agit simplement de donner l’apparence d’une politique certes diplomatique et pour ainsi dire consensuelle sans pour autant qu’elle soit efficace pour résoudre en quoi que ce soit la question orientale. Cette dernière en raison du changement de phase qu’elle engendre nécessite une autre approche que les pays membres de l’Union Européenne ne jugent pas encore diplomatique. Chacun d’entre eux espère que ce sera un autre qui fera le premier pas afin qu’il serve de bouc émissaire à tous les autres. Cependant les raisonnements uniformes habituels n’ont plus cours car même les nouveaux états membres de l’Union Européenne face à la criticité de la question se sont mis eux aussi au diapason européen. Ainsi la donne est plus difficile et nous avons véritablement affaire à un problème typique de la théorie des jeux. Le problème, c’est que tant que la question orientale ne sera pas abordée de cette manière, elle demeurera épineuse jusqu’à devenir inéluctable. Si les Etats membres de l’Union Européenne ne sont pas capables de prendre une décision séparément cela ne représente pas un problème en soi, l’essentiel c’est que celle-ci soit prise au nom de l’Union via le système des lobbies et des conditions qui sont si efficaces par ailleurs. L’histoire géostratégique montre que les pays européens ont eu diachroniquement du mal avec l’Orient. A présent que l’Union a englobé des états proches de cette région, elle doit exploiter au mieux leurs connaissances du terrain afin d’éviter des problèmes analogues à ceux de la guerre d’Orient.