1113 - Au-delà des partis, la constitution européenne
N. Lygeros
S’il existe un enjeu qui ne soit pas politique sur le plan européen, c’est bien la constitution. Cependant avec un système qui privilégie encore le positionnement nationaliste, un vote apolitique ne représente pas un avantage et sera sans doute la victime d’un fort absentéisme. Il est donc nécessaire de replacer cette succession de référendums dans un cadre géopolitique et géostratégique même si certains ne jugent que par la géoéconomie.
L’entité européenne a fortement évolué tout au long de son existence et ce particulièrement ces dernières années ne serait-ce que via le processus d’élargissement même si celui-ci ne représente que la partie visible de ses transformations. Au cours de cette évolution certaines notions sont apparues et leur réalisation s’est révélée nécessaire. La convergence des points de vue s’est peu à peu transformée en convergence de mouvements dans un cadre devenu multipolaire à l’échelle mondiale. La conséquence de ceci est double. Elle implique une restructuration interne et externe sans que ces deux parties puissent véritablement être dissociées. Dans un monde qui subit les pressions de l’espace virtuel d’où la nécessité de concept comme la dissuasion, il s’agit d’un truisme que d’associer la puissance à la crédibilité. La puissance peut demeurer potentielle mais la crédibilité doit être réelle car elle est directement soumise aux attaques structurelles. Aussi si l’Union Européenne veut être crédible et elle doit l’être, il faut qu’elle se restructure de manière à privilégier une approche globale même si celle-ci peut être multi-locale. De ce point de vue c’est bien la politique étrangère qui est en première ligne. Seulement pour être cohérente et consistante, la politique étrangère doit se doter d’une structure adaptée et celle-ci comporte nécessairement l’entité que nous dénommons constitution européenne.
Il ne faudrait donc pas axer la campagne des référendums sur la constitution européenne sur le caractère apolitique de cette dernière car en terme de communication il s’agit d’une erreur de target group. Au contraire, il faudrait mettre en avant l’avantage concurrentiel qu’elle constitue en terme de géopolitique et géostratégie. En effet ce choix est non seulement dicté par la réalité mais aussi par le fait qu’il représente une caractéristique constructive et créatrice d’une vision. Les pays qui forment l’Union Européenne doivent réaliser qu’ils ne peuvent jouer un rôle sur le plan international qu’à travers celle-ci. Elle correspond à un cadre catalytique en terme de synergie et elle est capable d’amplifier des mouvements coordonnés et convergents sinon les rapports de force s’annulent et nous obtenons alors une faiblesse inertielle. L’Union Européenne représente un atout stratégique dans la configuration multipolaire du monde actuel. Car même si la mondialisation semble négative elle n’est rien devant la mise en place d’un oligopole dont nous serions absents. La constitution européenne c’est un moyen pour l’union européenne de transformer ses rêves en visions.