8610 - La constitution des hommes
N. Lygeros
La constitution des hommes n’est pas une vue de l’esprit, pas même une abstraction. Elle correspond à une réalité axiologique aussi elle ne risque pas de craindre des questions de principes. Sa position est claire et elle consiste à défendre les hommes et non pas à servir de prétexte pour défendre les lois. La problématique de la pénalisation de la négation des génocides met en évidence non seulement la couardise et la lâcheté de certains, ce qui était une évidence en raison de l’existence des sociétés de l’oubli mais surtout la volonté de certains de se restreindre dans un cadre juridique qui se place au-dessus des hommes et de leurs droits. Certaines personnes agissent comme si elles étaient au-dessus des lois humaines alors qu’elles sont censées les représenter et les protéger. Nous avons pu constater à l’aide des motions de censure et des amendements combien de personnes ne se préoccupent pas des droits fondamentaux des hommes de toute origine. Cette attitude n’est pas seulement inadmissible sur le plan démocratique mais elle est insupportable sur le plan humain. Sans accuser personne d’être influencé ou même soudoyé, nous voulons affirmer clairement notre indignation en tant que défenseur des droits de l’homme. Le projet de loi sur la pénalisation de la négation n’est pas illégal. Il représente bien un processus existant dans des pays comme la Suisse et la Slovaquie en Europe mais aussi l’Argentine et l’Uruguay en Amérique du Sud. Il ne s’agit donc pas d’une première à proprement parler. Et dans le cas particulier de la Suisse, nous savons ce qu’il est advenu au moment de la condamnation et de l’efficacité de cette dernière puisque la négation officielle a complètement disparu dans ce pays. Aussi considérer cette loi comme un risque majeur de conflit entre la France et la Turquie c’est simplement la répétition des arguments du système turc qui se doit de menacer de la sorte pour justifier l’ensemble de sa diplomatie sur les affaires étrangères. Il s’agit donc d’un subterfuge qui sous couvert de constitutionalité agit sous l’influence du dogme et de la propagande turques. Ces arguments fallacieux ne trompent personne comme vient de le démontrer la décision récente du conseil de l’Europe avec sa résolution sur la nécessité pour la Turquie de reconnaître le multiple génocide à l’encontre des Arméniens, des Assyro- Chaldéens et des Pontiques. Nous voyons que le vent tourne dans ce domaine car de plus en plus de pays considèrent qu’il est inadmissible de la part de la Turquie de ne pas reconnaître ces faits du passé. Plus concrètement, il s’agit pour ce pays de prendre du recul et d’accepter des faits historiques. Sinon il risque d’être accusé de négationnisme actif. En effet, personne n’accuse la Turquie actuelle d’avoir commis ou de commettre un génocide. Cependant si la Turquie continue à l’heure actuelle d’influencer des sénateurs et des parlementaires d’autres pays pour promouvoir indirectement le négationnisme, alors elle risque ouvertement d’être accusée de commettre un génocide de la mémoire. Quant à ses défenseurs de tous bords, ils risquent eux aussi sinon d’être considérés comme des bourreaux de la mémoire, au moins d’être des collaborateurs de ce crime contre la mémoire de l’Humanité.