716 - Sur la nécessité du think tank
N. Lygeros
Traditionnellement, la société considère l’université comme un pôle de recherche car celle-ci tente par tous les moyens de donner cette image. Ce qui aurait pu être le cas dans le passé n’est désormais plus à l’ordre du jour. En effet, l’université via la massification de l’enseignement est devenue pour l’essentielle un centre de formation et ce, dans le meilleurs des cas. Issue de lois dont l’existence remonte au moyen-âge, l’université n’a su et n’a pu s’adapter aux nouvelles exigences. Sa structure interne s’est sclérosée selon le même phénomène qui agit sur les empires. L’augmentation croissante de responsabilités administratives a engendré une forte hiérarchisation et une tendance au mandarinat. La multiplication des sections et de leurs chefs associés a conduit le système universitaire à devenir un appareil étatique où la fonction de recherche est marginale. La prise de conscience de cette évolution-régression a incité la création de pôles technologiques plus sensibles à la recherche appliquée et plus aptes à collaborer avec les entreprises. Cependant, c’est la recherche proprement dite qui est dans une situation critique. En effet, malgré l’émergence officille de la pluridisciplinarité, celle-ci n’est pas encore véritablement admise. Aussi les équipes s’étiolent ou sont phagocytées par d’autres afin de devenir à leur tour des copies d’appareils étatiques. L’idée même d’un centre de recherche semble utopique en soi, si elle n’est pas associée à un projet précis. Quant aux structures publiques de recherche, elles représentent bien plus des ensembles de points isolés que de véritables structures de recherche. C’est pour l’ensemble de ces raisons que nous considérons le concept de think tank comme nécessaire. Ce dernier a montré son efficacité dans le domaine de la stratégie au sens large du terme et désormais il étend sont champ d’application aux domaines de l’éducation et de la formation. De conception radicalement différente, le think tank est une structure holistique. Son organisation est exclusivement pluridisciplinaire au point que le terme discipline perd quelque peu de son sens. Ses chercheurs proviennent de tous les horizons et coopèrent sur des projets qui nécessitent une approche fortement cognitive. L’indépendance du think tank lui procure aussi un rôle social puisqu’il peut juger de la compétance d’organismes officiels. La puissance de son approche provient de la rareté de ses éléments aussi bien nouveaux qu’anciens. Sa hiérarchie est extrêmement faible par nature ce qui lui offre une grande robustesse et une grande liberté d’action. Quant au recrutement de ses membres il est suffisamment souple pour permettre l’admission de cas hors normes ainsi il est hautement attractif pour un large spectre d’individus. Cette possibilité est une source d’enrichissement continuel d’un vivier dynamique. De plus la liberté de son fonctionnement permet une publication aisée des travaux de recherche sans devoir attendre la lenteur effarante des revues traditionnelles qui n’arrivent plus à suivre le rythme de la recherche et finissent par devenir des archives.
Il est donc difficile de ne pas admettre l’importance du concept de think tank dans le domaine de la recherche et du développement au sens large du terme en particulier dans une ère où la mise en réseau des informations nécessite une approche holistique.