6435 - Transcription de la lettre 32 de Paul Faure (21/10/2000)

N. Lygeros

Monsieur Paul Faure Paris, le 21 Octobre 2000
Paris

                                  Αγαπητέ μου Κυρ Νίκο!
     Non, jamais je n’atteindrai en grec la même dextérité
que vous en français. Sincèrement, j’admire l’adresse et la
richesse de vocabulaire avec lesquelles vous présentez le drame
d’Achille et de Penthésilée. Cela vaudrait d’être proposé et joué
au prochain festival d’Avignon, ou adressé à Madame Renée
Jacquin, rédactrice en chef de « Connaissance Hellénique. O Λύχνoϛ »
Pour être suggéré, soumis au théâtre universitaire de la Faculté des
Lettres d’Aix-Marseille. Le sujet, célèbre dans l’art antique, en vaut la peine.
Je ne vois à votre texte, si gentiment dédicacé à votre vieux
malade du coeur et d’esprit, que quelques impropriétés, faciles à
éliminer. Par exemple, p.1 (milieu) : « l’état de la mort » : le domaine, l’empire de.
p. 2 (des femmes… en nouvelle lune) et 3 (la femme-lune) : pas claire et plutôt drôle,
en fr. ; voyez l’expression : con comme la lune. Même remarque pour vos « f.-lune », p. 11
p. 3 (2è ligne) : « la femme… le maître », est l’âme de la guerre, pour garder le même
genre féminin, et surtout pas « la maîtresse ».
p. 4 (1ère ligne) : « Achille… le cœur est un phénix ». Jeu de mots à éviter : Phénix
est le précepteur d’Achille.
p. 4 (2ème réplique) « le générique implique l’universel » : ce n’est
pas clair du tout. Par quoi remplacer ce « générique » ?
p. 6 (3e ligne) : « la complétude » ( ?) : l’accomplissement, plutôt.
p. 7 (2e ″ ) : « elle chevauche… » : terme impropre et jeu de mots, car les
Amazones vont toutes… à cheval.
p. 8 (5e l. avt la fin) : « mes lances ont transpercé » : une seule a suffi.
p. 11 (4e l. ″ ″ ″ ) : « elles montrent toutes dans la direction… » Aucun sens.

p. 14 (4e réplique d’Achille) : « Patrocle est mort dans mon paraître »
Cela ne se comprend qu’en grec, où s’opposent aussi fréquemment
είναι μέν… φαίνεσθαι. Mettez des substantifs clairs à la place.
p. 18 ( 3ème ligne avt la fin) : « leuren vouloir » : incompréhensible ; pronom
collectif qui renvoie sans doute à « tout le monde », 2 lignes plus haut.
p. 18 (dernière ligne) : « C’est la seule façon d’aimer l’humanité ». Quoi ?
être seul, la solitude ? Ce n’est ni vrai, ni juste. Il y a bien
d’autres façons d’aimer l’humanité que de se cloîtrer dans
sa solitude, tel le moine, le prisonnier, le fou, l’orgueilleux.
A vous de jouer ! Et que si, par hasard, vous avez du
temps libre, de la patience, du courage, traduisez-moi en votre excellent grec
les trois pages 40,43,44 de Connaissance Hellénique O ΛΥΧΝOΣ, n° 77, Octo-
bre 1998, partie d’un article que j’ai intitulé «  Le linéaire A aux origines
de la langue grecque » * et envoyez-moi bien vite votre traduction, tapée à
la machine, si possible. Cela m’ests demnadé à l’Université d’Athènes
avec un complément, que je prépare, sur les hiéroglyphes crétois ;
il me semble évident désormais que les Minoens écrivaient et parlaient
une sorte de proto-grec, ancêtre du dialectes arcado-chypriotes, dès le
début du 2ème millénaire avant J.-C.
      Allons, terminez bien le 2ème millénaire après J.-C.et croyez à
la victoire finale de l’héllénisme autant que moi je crois à la victoire
de l’amour sur le monde, d’Achille amoureux sur Πένθος, le deuil que
provoque la guerre. Παθεῖν, μαθεῖν !
μετ’ αγάπης
                                                            P. F.
*Si vous n’avez pas cet article en français, dites-le-moi et je vous l’envoie aussitôt.