642 - Le sceau de la lettre (8)
N. Lygeros
Traduit du Grec par l'auteur
Quand elle reçut la lettre, elle se rappela leur première rencontre. Elle, elle le regardait mais lui ne la voyait pas. Il ne savait pas qu’elle serait à la rencontre secrète. Lui, devait parler, elle, devait écouter. Avant même que sa pensée ne commence à déborder sur eux, elle entendait ses mouvements. Il était inconnu. Elle était entourée de ses amis et les paroles du corps touchèrent sa pensée. C’était comme si elle le connaissait depuis longtemps mais elle ne savait d’où ni depuis combien de temps. Elle l’avait vu quelque part tandis que son regard à lui, ne l’avait jamais sentie. Elle n’entendit pas bien ce qu’il disait, l’important c’était son silence. Et à présent, sur sa lettre, c’était son silence qu’elle regardait. Elle était écrite à l’encre noire. Elle sentait qu’il aimait tous les combattants mais son combat à elle était différent, pour elle il n’y avait qu’un seul combat, la vie et la mort et entre eux l’amour. Ses paroles se perdaient dans le combat du silence. Il ne la vit pas mais il la sentit auprès de lui dès le premier instant. Ses mains étaient douces comme les roses et son corps une caresse de vent. Il ne lui parla pas, il entendit au début son silence, il ne bougea pas, il ne voulait pas la blesser avec un mouvement brusque. Il savait combien la lumière brûlait et il la laissa partir avec les ombres des autres. Elle ne devait pas souffrir, elle garda sa souffrance dans son poing. Il était né dans une tombe que la mémoire avait ouverte. Elle regarda à nouveau la lettre et vit la lumière du noir, l’encre était épaisse comme du sang. Quand elle baisa la lettre elle se rappela ses paroles. Sa mémoire avait gravé ses lèvres et il sentait les siennes même en exil. Elle ne l’avait pas cru, elle était fière, elle ne pouvait pas. Pourtant, quand elle vit ses lèvres sans sourire, elle ressentit sa blessure ouverte. Il ne pouvait la fermer qu’avec la sienne. Sur ses lèvres, la mémoire était devenue un baiser. Il ne voulait pas qu’elle le croie, il voulait vivre avec elle les instants rares qui referment les blessures et il ne répondit pas. Seulement, maintenant elle savait. La seule chose qu’elle voulait c’était faire sur sa bouche un sceau avec les trente baisers du soleil.