6128 - Transcription de la lettre 2 de Paul Faure (24/06/1993)
N. Lygeros
Paris, le 24 Juin 1993
Paul FAURE
Monsieur et cher collègue
Je m’empresse de répondre au vœu de votre aimable
lettre du 20 par l’envoi de la photocopie de mon article
sur les deux inscriptions en écriture linéaire A de Knosos, peintes
sur gobelets, en vous priant de m’excuser si je ne peux vous
adresser l’original : j’ai épuisé mon lot de tirés à part.
Comme je repars très bientôt pour les rivages méditerranéens,
je ne puis que vous confirmer brièvement que le principe mathématique
« deux quantités égales à une même troisième sont égales entre elles »
s’applique aux trois systèmes syllabiques B, A, C, à la double condition
que l’on considère B comme plus archaïque de forme que A, et homo-
phone de C (ce qui n’est douteux que pour quelques signes cypriotes
tels qu’ils sont utilisés dans les inscriptions des VIe – IVe s. av. J. – C). Il
s’agit donc à la fois d’une évidence et d’une hypothèse de travail, qui
me permet d’affirmer, comme vous pouvez le constater par mes
essais linguistiques, que la langue écrite et parlée par les Minoens
du système A, entre le XVIIe et le XIVe s. avt J. – C., était de type indo-européen,
une sorte de proto-grec, dont on retrouve des traces dans les
dialectes arcadien, chypriote et pamphilien, mille ans plus tard.
Vous constaterez que mes lectures des signes du linéaire A ont
quelque peu varié et se sont précisées et simplifiées entre La vie Quoti-
dienne en Crète (écrite en 1972) et mes dernières publications, 20 ans plus
tard. Mais l’analyse morphologique des signes que l’on croyait spécifi-
ques et surtout les résultats qu’elle permet d’obtenir, notamment pour
L 61, 88 et 100b, m’assurent que je suis dans a bonne voie.
Ne m’envoyez pas votre mémoire sur la science de l’ Ερωτόκριτος :
attendez qu’il soit publié et que je sois retourné dans la patrie de Vincenzo
Cornaro dont il est question de me faire citoyen d’honneur.
Je vous souhaite de beaux voyages, d’heureuses vacances en famille
et vous félicite pour votre citation de Sophocle, Electre 617-618, en toute
sympathie et affection.
P. Faure