2862 - Dialogue asocial
N. Lygeros
– Quand cesseras-tu d’écouter ces chansons ?
– Quand le monde deviendra réel.
– Il ne changera pas.
– Nous continuerons néanmoins à créer.
– La société n’a que faire de cela.
– Nous ne le faisons pas pour elle.
– Pour qui alors ?
– Pour l’humanité. Seulement pour l’humanité.
– C’est une abstraction.
– Cela ne signifie pas qu’elle soit un non sens.
– C’est vrai mais est-ce utile ?
– Qu’importe l’utile !
– Mais alors ?
– Le beau suffit !
– A qui ?
– Au vrai.
– Comment peux-tu penser être dans le vrai ?
– Car je n’appartiens pas à la societé du bonheur.
– Il n’en existe pas d’autre.
– Je le sais bien.
– Je ne saisis pas ta question.
– C’est celle de la résistance.
– Contre qui ?
– Le rire de dieu.
– Tu es complètement ivre.
– J’ai bu trop de silence.
– Tu en as perdu la tête.
– Mais pas la parole !
– Qu’insinues-tu ?
– Je pense qu’il devrait avoir des remords.
– Pourquoi ?
– Face au génocide.
– Quel génocide ? Le temps efface tout.
– Le temps n’efface rien, ce sont les gens qui oublient.
– Ne parle pas de mémoire.
– Car elle est interdite par la société ?
– Prière de ne pas déranger…
– Exactement !
– Ne compte pas sur moi.
– Tu seras condamné.
– Je suis né ainsi. Condamné à vivre. Aussi je ne crains pas de vivre pour être condamné.