22536 - Remarques topostratégiques sur le Traité de Karlowitz
N. Lygeros
Après l’invasion de Chypre en 1571 et celle de la Crète en 1669, l’Empire Ottoman tente de s’enfoncer de plus en plus profondément dans l’Europe via les Balkans. Il exploite d’une part le morcellement de la région pour s’emparer de la Podolie en 1672 et d’autre part les tensions qui existent en Europe occidentale avec la Guerre de Dévolution (1667-1668) et la Guerre de Hollande (1672-1678) pour assiéger Vienne en 1683 pour la seconde fois après l’échec du premier siège en 1529. Car l’Empire considère que ces territoires lui appartiennent de droit. Cependant la fin de cette stratégie brutale et frontale qui ne tient guère compte de la population locale se termine avec le Traité de Karlowitz en 1699. Il est possible de voir à travers les changements de ce dernier que l’Empire Ottoman a tenté avec son enfoncement dans l’espace européen de prendre à revers la puissance vénitienne via un contournement balkanique. Aussi son échec est d’autant plus grand qu’il comporte des pertes en apparence sporadiques mais fondamentales sur le plan stratégique. Ainsi la Sainte Ligue retrouve la Podolie, la quasi-totalité de la Hongrie, la Slavonie, les droits de suzeraineté sur la Transylvanie, la Dalmatie, les droits de suzeraineté sur la République de Raguse, l’île de Sassos et la Morée. L’examen sur la carte permet de comprendre l’importance du revers de l’Empire Ottoman mais aussi le début de son déclin qui sera confirmé par le Traité de Constantinople en 1700 qui met fin à la guerre avec l’Empire Russe qui a commencé en 1686. La perte d’Azov et de la base militaire navale de Taganrog ne fait qu’accélérer le processus. A vouloir pénétrer dans l’espace européen de toute part, sans être capable d’assurer ses défenses, l’Empire Ottoman subit la contre-attaque chrétienne et s’effondre lamentablement.